#42 : Sang pour sang bad !
Á Halloween seuls les chauves sourient !
Affiche scarifiée Maxime Fontaine, pour le club de Taverny / Saint-Leu (Les As du Volant 95).
Un visuel qui uppercute et fait mal, horriblement mal (aux gencives) !
Création qui gicle, qui pulvérise généreusement, joyeusement, de l’hémoglobine, au risque de l’éclaboussure. Tiens prends ce volant dans les ratiches, tu m’en diras des nouvelles, si t'arrives encore à balbutier !
Mise en scène qui s’engouffre résolument dans l’épouvantable, le répugnant maîtrisé, la bavure raffinée, le Gore méticuleux. Affiche « Blood and Gore », ensanglantée, hémorragique, qui rompt avec les peu inquiétantes sorcières chevauchant une raquette-balai, les squelettos carnavalesques et autres zombies de pacotilles, décorant habituellement les halloweenesques tournois.
Du côté du 9-5, on ne fait pas dans la riante citrouille édentée, ni dans le drap fantomatique de noir immaculé, ces plaisanteries pour enfants sages en quête de mamies-friandises. Ici, on plonge direct dans l’horreur brute, dans l’abomination délirante, la débauche surréaliste poussée jusqu’au grand-guignolesque ! [2]
Gros plan sur un (presque) demi-visage férocement déformé, viscéralement tordu, à en devenir rigolo.
Car au-delà de la répulsion, du saisissement, d’un éventuel haut-le-cœur, c’est finalement le rire libérateur, l’hilarité cathartique, qui s’impose et balaie tout écœurement.
Mêm’ pas peur !
Car c’est d’évidence pour de rire, pour se fendre la poire.
Esthétiquement impeccable, grotesquement nickel, chirurgicalement irréprochable, et donc au-delà du réel, trop beau pour être vrai.
Le castagné, improbable victime d’un badiste-fou (un psycho-badiste à l’humeur massacrante), ou plutôt zombie rectifié avec les moyens du bord, est un acteur qui joue un peu trop bien le jeu. Il surjoue, et cela ce voit. Il y a outrance diabolique, déformation jusqu’au clownesque luciférien.
Une « esthétique de l’excès », soignant le détail, fascinante mais fictive… Quoique, on ne sait jamais… « Pas réel, mais tellement bien fait, tellement parfait que malgré tout on pourrait penser que… » [1]
Cette image de mutilation à vif, de charcutage sans anesthésie, un arrachage de chicots à la brutale, cannibalise le regard.
L’arrêt sur image, en plan serré, fonctionne comme un ralenti. Il dilate l’instant de l’impact, de la pénétration, et de la douleur. C’est le moment crucial où le projectile perfore les chairs. Annonce d’une explosion folklorique, d'une mise en miettes et radicalement hors de service de ce mort-vivant.
Dans ce chaos sanguinolent seul l’œil reste intact. Non-souillé, écarquillé, cyclopéen, démoniaquement lumineux, il interpelle méchamment. Comme une invitation à venir se mêler au combat qui fait rage, à venir se frotter aux cohortes de zombies [3] et contenir leur pittoresque invasion à grands coups de volants.
Une affiche épouvantablement séduisante, monstrueusement burlesque, sanguinairement poétique.
Une affiche du meilleur « dégoût » !
Notes :
[1] Cf. Philippe Royer, Le Cinéma gore. Une esthétique du sang, Paris, Éditions du Cerf, 1997, p. 14.
[2] Sur l'origine de l'expression « C'est du grand-guignol », voir d'Agnès Pierron, Les Nuits blanches du Grand-Guignol, Paris, Éditions du Seuil, 2002.
[3] À déguster, de Jovanka Vuckovic, Zombies ! Une histoire illustrée des morts vivants, Paris, Éditions Hoëbeke, 2013.
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