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    Comment distinguer Jeunes et Vétérans sans tomber dans une caricature outrancière, alors peu flatteuse pour les aînés ? Comment disjoindre les deux catégories d’âges en les rendant immédiatement identifiables, tout en évitant de les projeter dans des extrêmes vertigineux ? Comment, signifier un écart, sans pousser jusqu’au grand-écart, au risque de l’écartèlement douloureux, de la rupture chez ceux manquant d’élasticité !
    Car, si moins de 20 ans sépare les derniers jeunes (les juniors 2ème année – 18 ans) des premiers vétérans (les V1 – des jeunots de tout juste 35 ans), lorsque l’on prend en compte les pichouns et les papés, pôles occupés par le Minibad (à partir de 5 ans) et par les V8 (les plus de 69 ans), l’amplitude atteint a minima les 65 annuités…
    Dès lors, comment représenter l’ancienneté sans blesser, mais en faisant simplement sourire.
    C’est à cette délicate tâche que les graphistes du club Nantais « Don Bosco » s’attèlent depuis quelques années pour illustrer le tournoi « Vétéran & Junior » du DBBN, tout en cherchant à coller à « l’esprit boscovite », un esprit transgénérationnel, « du minibad plein d’entrain à l’inconditionnel vétéran », dixit le président.

Don Bosco Badminton - Nantes (44) - 2018 - © Loriane Tardif

 

 Boscoliprane versus HariBosco
    En 2018,  Lauriane Tardif a ainsi astucieusement recouru à la métaphore des « gourmandises » réconfortantes pour distinguer et donner « corps » aux deux entités :
    – des pilules « miracles », produites par les laboratoires Don Bosco pour les anciens : le Boscoliprane, pour mettre en sourdine (le temps d’un tournoi) les douleurs articulaires, tout en stimulant des anatomies chancelantes. Apaiser tout en redonnant vigueur et verdeur !
    – et, pour les gaminous, des guimauves multi-colorées : des HariBosco. Friandises sans doute portées par le slogan « HariBosco, c’est Bosco la vie, pour les grands et les petits ! »
    Tandis que le vétéran « prend ses pilules », le jeune reste accroc aux sucreries gélifiées, « pleines de tendresses », qui collent aux dents ! 

 

Don Bosco Badminton - Nantes (44) - 2019 - © Loriane Tardif

 

Raquette haute et Canne baissée
    L’affiche de 2019 associe d’évidence les vétérans à une canne de marche, dite « classique » (dotée d’une poignée en forme de T), dont la blancheur n’est pas sans rappeler aussi une canne de non-voyant… présages d’un inéluctable vieillissement, rythmant avec arthrose et presbytie !
    La canne comme prothèse d’une anatomie défaillante et ankylosée, mais aussi signe de maturité et de sagesse (canne de patriarche et de pèlerin)... « Plus qu’un tournoi, une sagesse d’esprit », clame l’affiche.
    La raquette comme symbole de la vitalité de jeunes-pousses combatives.
    Juniors et vétérans se croisent mais ne tiennent pas le même bout du manche, ni ne pointent leur « arme » dans la même direction…
    La composition de l’affiche tient de l’armoirie chevaleresque, du blason héraldique, présentant deux épées croisées dites « en sautoir ». Elle est à ce titre empreinte de noblesse et signe de vaillance (l’épée étant une arme de corps à corps). Mais, en généalogie, cette croix symbolise également le décès d’une personne morte au combat…
    D’un côté une raquette qui pointe en l’air : l’épée haute, prête pour la bataille, pour l’action, de l’autre une canne émoussée, dirigée vers le bas, signe d’abattement et de retraite… à moins que ce ne soit de clémence et de pardon !
 

Don Bosco Badminton - Nantes (44) - 2020 - © Marion Delaunay

 

Playmobil badiste bifron

    Pour l’édition de 2020, Marion Delaunay a, elle, opté pour un corps « double face », en l’occurrence un bonhomme Playmobil scindé en deux. Une sorte de portrait bifron (accolant deux visages opposés), un peu à la manière du Dieu Janus : une demi-portion juvénile juxtaposée à une demi-anatomie plus mature.
    Comme si le blanc-bec avait été artificiellement altéré en passant dans un logiciel de Morphing, à base d’algorithmes présageant de la constitution future, donc intégrant des détériorations à venir ! Une expérience qui, poussée trop loin (lorsqu’elle fait « vieillir de l’état de bébé à vieillard ») peut se révéler démoralisante…
    Dans la main du junior a été fixé l’accessoire indiquant sa qualité de badiste (notons que s’il existe des figurines Playmobil de pongistes et de tennisman, celle du badiste n’a pas encore été créée par l'entreprise…).
    La facette vétéran s’apparente au look Hipster (littéralement « branchouille »), au négligé travaillé, à moins que ce ne soit plus banalement un célibataire endurci, un « vieux garçon » qui se laisse quelque peu aller…, un mal rasé (levé tôt, trop tôt, après une soirée entre potes, pour cocher présent à l’heure matinale fixée par la convocation...).
    En tout cas, la pratique (sans doute intensive) du bad a laissé quelques séquelles, des blessures que le bandage de la cuisse tente d’endiguer (un strapping qui fait d’ailleurs penser à la cuisse d’un rugbymen « dur au mal » [2]).


    À ses pieds, le baume Bosco’balm indique qu’il prend soin de ses muscles, cherche à les délier, en calmant les douleurs chroniques limitantes. Un clin d’œil aux « chers vétérans du club qui, dixit la créatrice de l'affiche, sentent (parfois, souvent) l'odeur forte mais agréable du Tiger Balm ! » Un baume chauffant qui soulage des tracasseries musculaires et articulaires, pour retrouver félinité et mordant d'antan. Le recours à une médecine extrême-orientale pour exécuter quelques sauts chinois, comme au « bon vieux temps », et montrer aux juniors que les anciens ont encore un tigre qui sommeillent en eux, un fauve qu'il vaut mieux ne pas réveiller !
    Un primo-vétéran qui, bien qu’il conserve intacte sa « jeunesse d’esprit », est « toujours bien équipé avant d'entrer sur le terrain (trousse de secours, encas, hydratation) », comme l'observe encore avec affection Marion Delaunay. Un vétéran qui prend soin de se réhydrater régulièrement en buvant de la Bosc’eau et a appris que pour « refaire [ses] stocks de glycogènes » et « contrecarrer l’acidité engendrée par l’activité physique », il lui faut régulièrement manger des bananes bien mûres (car, pour qu’il fasse office d’ « élément supra-énergétique sous forme glucidique », encore faut-il que le fruit soit bien à point, sinon gare aux ballonnements et aux diarrhées…) [3].

À méditer, en conclusion, cet aphorisme de Groucho (le plus célèbre des Marx Brothers) :
« Dans chaque vieux [vétéran], il y a un jeune qui se demande ce qui s’est passé. » [4]


NOTES :
[1] En rugby le nombre de rouleaux de strap utilisés annuellement par les gros clubs se compte par milliers !
[2] Badger signifiant blaireau (mammifère emblème de la marque), de là à penser que cet onguent est le « baume du blaireau »...
[3] Cf.
« La banane : bon ou mauvais pendant l'effort », à lire sur le site lequipe.fr en cliquant ICI.
[4]
Cf. Chantal Knecht, Les Marx Brothers par eux-mêmes, Paris, Laffont, « Bouquins », 2020.

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